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L’actinolite empoisonne les travaux publics
- Par formation-prevention-amiante
- Le 28/10/2014
- Dans Actualités
La détection d’une nouvelle forme d’amiante dans certains enrobés a grippé, dans plusieurs départements, les travaux sur voirie.
Le secteur des travaux publics n’avait pas besoin de ça. Le décret 2012-639 du 4 mai 2012, qui a étendu aux opérations de travaux sur voirie les obligations de gestion des risques sanitaires liés à l’amiante, visait jusqu’ici certains enrobés renforcés entre 1970 et 1995 par des fibres d’amiante de type « chrysotile » (ou « amiante industriel », voir encadré). Maîtres d’ouvrage et entreprises de travaux publics, malgré les répercussions importantes de ces nouvelles prescriptions en termes de durée, d’organisation et de coût des travaux, ont mis tout en œuvre pour assurer la sécurité des interventions sur des produits dont le caractère amiantifère n’est contesté par personne. Mais il y a un an, en juillet 2013, à l’occasion d’opérations de repérage d’amiante « industriel » avant travaux, diligentés par le conseil général des Deux-Sèvres, voilà que des analyses ont identifié pour la première fois dans les granulats des enrobés des traces de d’« amiante actinolite ». L’actinolite est une roche naturelle dont l’une des variétés, largement minoritaire, peut s’avérer amiantifère. En l’occurrence, le laboratoire mandaté par les Deux-Sèvres a considéré qu’il s’agissait de la variété amiantifère. Par précaution, le maître d’ouvrage a suspendu la vingtaine de chantiers qu’il avait programmés. Il a ensuite lancé une série de contre-expertises à l’hiver 2014… et a abouti à des conclusions inverses : « Pour chacun des vingt-trois chantiers concernés, au moins un autre laboratoire n’a pas détecté d’amiante actinolite », témoigne Thierry Chouette, du conseil général des Deux-Sèvres (lire l’avis d’expert ci-dessous).
Après les Deux-Sèvres, d’autres collectivités locales, situées dans des zones géologiques où l’actinolite est naturellement présente dans les carrières de granulats, ont dû faire face au même problème : Saint-Brieuc, la Communauté urbaine de Bordeaux (CUB), celle de Nantes, mais aussi Nancy dans l’Est, ou le Sipperec, autorité concédante pour l’électricité et l’énergie qui regroupe 107 collectivités franciliennes.
Expertises et contre-expertises se contredisent
A chaque fois, le scénario des Deux-Sèvres s’est répété : les laboratoires mandatés pour les contre-expertises n’ont décelé aucune présence d’amiante actinolite, alors que les analyses initialement menées en avaient détecté des « traces ». Conclusion unanime : les analyses des laboratoires ne sont pas fiables.
C’est en réalité la méthodologie employée par les laboratoires qui est pointée du doigt. « Les fibres d’amiante actinolite présentent une morphologie particulière qui ne peut être caractérisée qu’avec des équipements scientifiques très coûteux dont la quasi-totalité des laboratoires accrédités ne disposent pas », explique le directeur technique d’une grande entreprise de travaux publics. En clair, les laboratoires sont capables de détecter la présence de fibres d’actinolite, mais ils ne seraient pas en mesure de conclure à coup sûr sur leur caractère amiantifère. Par prudence, certains laboratoires mentionnent alors la présence de « traces ».
Tout irait pour le mieux si ce débat d’experts restait circonscrit à la sphère technico-scientifique. Mais il a un impact majeur sur la vie des chantiers. Car sur le terrain, c’est le statu quo. Si certains maîtres d’ouvrage décident malgré tout de mener leurs chantiers normalement, beaucoup activent le principe de précaution. Celui-ci se traduit de deux manières différentes : soit le maître d’ouvrage décide de poursuivre les chantiers en appliquant la réglementation « amiante » tel qu’ils l’auraient fait pour un enrobé contenant des fibres de type « chrysotile », mais au prix d’un surcoût majeur, qui atteint + 40 % selon certains maîtres d’ouvrage. Soit il peut aussi se voir contraint de suspendre la totalité des chantiers où la présence d’amiante actinolite est suspectée, par impossibilité budgétaire, en attendant qu’un protocole d’analyse fiable et commun à tous les laboratoires ait été créé.
Les entreprises de TP en première ligne
Evidemment, aucune des deux options n’est satisfaisante. Toutes les entreprises de travaux publics en subissent les conséquences doublement : sur leur activité « travaux », mais aussi sur leur activité industrielle de recyclage des enrobés, pour laquelle elles ont largement investi ces dernières années. « Pour une fibre décelée, dont on n’est même pas sûr qu’elle soit de l’amiante, on peut condamner quelques milliers de tonnes de matériaux recyclables à la décharge, déplore un chef d’entreprise. D’autant qu’étant par défaut considérés comme des déchets amiantés, les agrégats suspects doivent être envoyés dans des centres d’enfouissement de classe I, au coût de stockage extrêmement élevé, et pourtant saturés dans certaines régions du fait d’un manque d’installations. »
Entreprises et collectivités ont alerté les pouvoirs publics qui semblent avoir pris conscience du problème. Le ministère de l’Ecologie a ainsi monté un groupe de travail réunissant notamment l’INRS, le BRGM et les organisations professionnelles du secteur afin de définir un protocole-type pour les stratégies d’échantillonnage, de prélèvement et d’analyse des enrobés.
« L’urgent est de trouver une méthode fiable, simple et reproductible pour distinguer l’actinolite des quelques rares formes d’amiante actinolite afin de lever les doutes », estime Jacques Tavernier, président de l’Union des syndicats de l’industrie routière française (Usirf). Parallèlement, les pouvoirs publics viennent de saisir l’Agence nationale de sécurité sanitaire (Anses) pour évaluer la présence de fibres d’amiante actinolite dans les granulats d’enrobés routiers et réaliser une évaluation des risques pour la santé des personnes exposées à ces particules.
Certains recommandent aussi de s’inspirer des pays voisins. L’Allemagne, par exemple, a instauré un seuil quantitatif unique valable pour tous les types de fibres d’amiante. Au-delà de 0,1 % en masse de fibres amiantées présent dans le matériau, les obligations réglementaires liées à l’amiante s’appliquent. En deçà, le chantier se déroule de manière classique, mais les entreprises protègent néanmoins leurs salariés et s’assurent qu’il n’y a pas d’envol de fibres.
Les carriers sont soumis à la réglementation amiante
La partie « amiante » du règlement général des industries extractives (RGIE) a été abrogée, en vertu d’un décret du 16 juillet publié cet été. Le texte « rend applicables dans les mines, les carrières et leurs dépendances les règles prévues par le Code du travail en matière de protection contre l’amiante ». L’UNPG et l’Unicem indiquent qu’elles avaient déjà préparé leurs adhérents.
Des principes d’interventions cadrés
Définitivement interdit en France en 1997, l’amiante a été largement utilisé dans le secteur du bâtiment. Dans la route, des fibres d’amiante de type chrysotile ont été ajoutées industriellement dans certains bitumes entre 1970 et 1995 pour améliorer les performances mécaniques des enrobés. Si l’on connaît la quantité approximative globale d’amiante qui a été utilisée pendant cette période, il est en revanche impossible d’effectuer un recensement géographique exhaustif des chaussées qui en contiennent. Deux raisons à cela : d’une part, les données de récolement ne sont pas toujours disponibles, d’autre part l’incorporation dans les chaussées plus récentes d’agrégats d’enrobés recyclés issus de couches potentiellement amiantées amène à considérer que toute chaussée peut potentiellement en contenir. Si bien que le principe des diagnostics amiantes préalables au démarrage d’un chantier de voirie se généralise. Le décret 2012-639 du 4 mai 2012 qui étend les obligations réglementaires liées à la détection, au retrait et au traitement des produits amiantés aux opérations de travaux sur voirie, a conduit le ministère de l’Ecologie à publier une circulaire le 15 mai 2013. Celle-ci donne des instructions opérationnelles (cartographie des zones amiantées, modalités d’intervention, gestion des déchets, information du personnel…) et s’applique au réseau routier national. Toutefois, les autres niveaux de maîtrises d’ouvrage publiques s’en inspirent pour répondre aux problématiques de leurs propres réseaux.
Des outils concrets ont vu le jour dans la foulée. Fin 2013, un groupe de travail associant plusieurs organismes (l’Union des syndicats de l’industrie routière française, la Direction générale du travail, la Cnam-TS, l’INRS, le Groupement national des médecins du BTP, la FNTP et l’OPPBTP) a publié des recommandations techniques et méthodologiques à l’attention des maîtres d’ouvrage (disponible sur le site de l’Usirf) et permettant d’encadrer les interventions sur voirie.
Des contraintes en cascade
Les chantiers s’organisent en trois phases : le repérage avant travaux, les travaux, et la gestion des déchets (voir schéma ci-dessus). Suivant le type d’opérations effectuées sur le chantier et la quantité de poussières d’amiantes qu’elles sont susceptibles de générer, l’ampleur des dispositifs de protection à mettre en place varie. Ainsi, les travaux sur enrobés amiantés relevant de la sous-section 4 correspondent à des interventions ponctuelles sur les revêtements routiers (ouverture de tranchées, sciage d’enrobés…) et sont les moins contraignants. Les intervenants doivent néanmoins suivre une formation dédiée. Les travaux de démolition, de déconstruction ou de rabotage de chaussées relèvent eux de la sous-section 3. Dans ce cas, en plus de la formation des intervenants, les entreprises doivent être certifiées, et ce depuis le 1er juillet dernier.
Alors que la distinction entre travaux relevant de la sous-section 3 ou de la sous-section 4 fait encore l’objet de discussions entre les professionnels et la direction générale du travail, les premiers estiment que les formateurs et les structures de formation sont encore trop peu nombreux.
http://www.formation-prevention-amiante.com/
Centre de formation en prévention du risque amiante sous-section 4 en Rhône-Alpes et sur toute la France.
Le plan "amiante" pour les HLM du gouvernement
- Par formation-prevention-amiante
- Le 29/09/2014
- Dans Actualités
Les organismes HLM pourront emprunter à l'État jusqu'à 400 millions d'euros par an pour débarrasser les logements sociaux de l'amiante.
Le gouvernement va faire un geste pour favoriser le désamiantage des HLM. Mardi matin, au congrès du mouvement HLM, la ministre du Logement, Sylvia Pinel, a annoncé le déblocage de fonds pour lancer cette opération. De l'ordre de 400 millions d'euros par an.
Concrètement, les organismes de logement social qui sont propriétaires des HLM en France pourront désormais emprunter auprès de la CDC (Caisse des dépôts et consignations) jusqu'à 10.000 € par logement pour le désamianter. Ces prêts seront accordés à des taux très bas. Ces financements seront mobilisables pour débarrasser de cette fibre hautement cancérigène au maximum 40.000 logements par an. Un plan qui va dans le bon sens mais qui ne répond pas aux énormes enjeux du problème. Selon l'USH (Union sociale pour l'habitat) qui regroupe les organismes HLM, trois millions de logements sociaux sont gangrenés par l'amiante. On en trouve dans les faux plafonds, dans les gaines de chauffage, les revêtements de sol… Si on voulait désamianter tout ce parc, il faudrait investir 15 milliards d'euros. Des sommes énormes, car ces chantiers ont vu leur coût bondir de 50%, notamment avec la nouvelle réglementation intervenue en mai 2012. Par ailleurs, le prix moyen pour enlever un revêtement de sol amianté dans un appartement se situe, selon la superficie, entre 20.000 et 25.000 euros. Pas sûr donc que les 10.000 euros de prêt suffisent à régler le problème de l'amiante dans les HLM.
La règlementation kafkaïenne des parties privatives locatives
Depuis la fin des années 90, la règlementation impose de repérer l'amiante quand un propriétaire vend son appartement, c'est le fameux «diagnostic amiante». Mais en ce qui concerne les parties privatives locatives, l'État a traîné les pieds avant qu'une telle règlementation ne voie le jour. Depuis 2001, les parties communes locatives doivent faire l'objet d'un repérage. Mais pas les parties privatives. «Le refus venait du ministère du Logement, explique Michel Parigot, vice-président de l'Association Nationale de Défense des Victimes de l'Amiante (Andeva). Les politiques ne voulaient pas entendre parler d'une règlementation pour les locations en raison de l'amiante dans les logements HLM». Depuis le 1er avril 2013, la loi oblige tout propriétaire bailleur à tenir à disposition du locataire, sur simple demande, le diagnostic amiante. Doivent être diagnostiquées les parties privatives et communes des immeubles dont le permis de construire a été délivré avant le 1er juillet 1997. Mais sont concernés seulement les matériaux de la liste A, autrement dit les flocages, calorifugeages et faux-plafonds, très rares dans les HLM...
Aujourd'hui, en France, quelque 12 millions de personnes sont logées dans des HLM, soit 17% des ménages. Le parc HLM représente 4,3 millions de logement. Cet été, le Haut conseil de la santé publique estimait que l'amiante pourrait provoquer entre 68.000 et 100.000 décès en France d'ici à 2050: «Il faut s'attendre entre 2009 et 2050 à un nombre de cancers du poumon dus à l'amiante de l'ordre de 50.000 à 75.000 auxquels s'ajoutent 18.000 à 25.000 décès dus au mésothéliome, sans même compter d'autres cancers tels que ceux du larynx ou des ovaires pour lesquels la responsabilité de l'amiante a été confirmée par le Centre international de recherche sur le cancer (Circ) en 2009», relevaient les experts.
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Centre de formation en prévention du risque amiante sous-section 4 en Rhône-Alpes et sur toute la France.